Qui se soucie de l’aménagement de nos forêts au Québec? Pas grand monde semble-t-il, en particulier dans les médias. C’est dans l’indifférence médiatique la plus complète que le Ministère des Ressources naturelles (MRN) a publié le 3 avril dernier un communiqué qui, sous un vocable jovialiste, consacrait en fait l’échec d’une politique adoptée en avril 2010 et entrée officiellement en vigueur… le 1er avril 2013! Cette politique forestière faisait du MRN le grand responsable de tout ce qui se passait en forêt, dont la certification forestière. L’industrie était essentiellement reléguée au rôle d’acheteur de bois. Cela fut vrai jusqu’au 3 avril… Si nous étions « un pays forestier », comme on se plait souvent à le dire, nous aurions dû entendre parler un petit peu de ce communiqué et de ses conséquences, mais non… Alors, pour la postérité, disons un mot sur ce changement fondamental, et ignoré, dans la politique forestière québécoise.
Retour en grâce de l’aménagement forestier dans les Forêts nationales
Dans les dernières années, l’aménagement des forêts nationales américaines a pris un tournant dans lequel le mot « collaboration » est omniprésent. Je vous ai présenté cette évolution dans le cadre de mes chroniques touchant les Planning rules. Plus spécifiquement, je vous avais présenté l’automne dernier le cas de la Forêt nationale de Colville qui se veut un modèle du genre et Le Modèle utilisé dans l’élaboration des dernières Planning rules. Mais ce n’est pas le seul exemple et c’est pourquoi aujourd’hui je vais vous présenter comment s’articule cette stratégie de « collaboration » dans le grand réseau des Forêts nationales. Une considération essentielle à la compréhension de l’aménagement de ces forêts et, surtout, comment cette stratégie contribue à revaloriser le principe même d’aménager une forêt.
Politiques forestières : pour des principes intemporels
Je devais vous entretenir cette semaine des différents enjeux d’un amendement à la législation forestière en Colombie-Britannique (Forest Act) qui allait autoriser les compagnies forestières, sous certaines conditions, à convertir leurs garanties d’approvisionnement en une forme de concessions forestières. Dans ma dernière chronique sur la situation dans cette province, je mentionnais que la perspective de cette conversion de tenure, qui est une des nombreuses suites des impacts de l’épidémie du dendroctone du pin ponderosa, ne semblait pas faire de vagues… C’était avant que l’amendement ne soit officiellement déposé! Depuis, les critiques ont été telles que le gouvernement, face à une échéance électorale en mai, a préféré laisser tomber son projet… ce qui a annulé mon idée de chronique par le fait même! Mais la mort de cet amendement a fait naître une petite réflexion sur l’aménagement des forêts publiques que je vous présente aujourd’hui.
En attente des élections, la redéfinition de la stratégie pour l’aménagement des forêts publiques de la Colombie-Britannique dans un contexte post-dendroctone se retrouve donc en suspens. Plusieurs réclament une Commission royale sur le sujet. Ce serait la quatrième en à peine un peu plus de 100 ans, soit approximativement le temps pour un arbre d’atteindre sa maturité. C’est-à-dire qu’à ce rythme, un arbre planté en Colombie-Britannique aujourd’hui verra potentiellement trois à quatre Commissions royales pour déterminer la meilleure stratégie pour l’amener à maturité (je simplifie…). Une situation d’éternel recommencement qui se rapproche de ce que vivent les Forêts nationales américaines et les forêts publiques au Québec.
LEED : le cheval de Troie vert de l’acier et du béton?
Parmi les champs d’intérêt que j’ai développés depuis l’ouverture de ce blogue, il y a le grand dossier des constructions non résidentielles en bois, un dossier important au Québec. Ce qui est au fond logique pour un blogue dédié à l’aménagement forestier, car la promotion de la culture dans ce domaine va de pair avec une culture d’utilisation du bois. L’effet collatéral de cet intérêt est que je garde toujours un oeil sur l’actualité liée à la certification LEED (Leadership in Energy and Environmental Design), qui est en voie de devenir LA certification « verte » des immeubles. Lorsqu’est paru l’automne dernier un dossier du USA Today sur la certification LEED avec le titre In U.S. Building industry, is it too easy to be green? ma curiosité a naturellement été attisée. Malgré le « petit » délai entre le dossier et cette chronique, les enjeux soulevés par les journalistes du USA Today gardent tout leur intérêt aujourd’hui.
Le point de départ de l’enquête des journalistes du USA Today fut l’hôtel Palazzo à Las Vegas. Cet hôtel de plus de 3000 chambres (en fait, des « suites »), que vous pouvez imaginer très luxueux (sept piscines, trois télés par « suite »…), a obtenu une certification LEED qui fut payante, car elle lui a valu un congé de taxes foncières de 27 millions $ sur 10 ans. Et c’est là que les journalistes ont « accroché ». Pour obtenir sa certification, l’hôtel a tiré profit d’une série de mesures « faciles » à atteindre comme d’avoir des stationnements incitatifs pour les véhicules verts. Ces stationnements étaient occupés par des Hummer et autres énergivores au moment du passage des journalistes…
C:FauneForêtMRN.exe
Le 31 janvier dernier, s’est tenu un colloque de l’OIFQ (Ordre des Ingénieurs Forestiers du Québec) sur le thème de la gestion intégrée forêt-faune. Un colloque dont la perspective a suscité mon enthousiasme, car avant mon doctorat ma carrière professionnelle était très orientée « forêt-faune ». C’était donc comme retrouver des premières amours! L’enthousiasme qui m’animait tout au début s’est cependant changé en perplexité au fur et à mesure que la journée avançait.
Au départ, je me suis demandé si cette impression était due au fait que je n’avais pas lu les « petits caractères » décrivant le colloque. J’étais venu dans l’esprit de mettre à jour mes connaissances, mais dans les faits le colloque était axé sur la présentation de projets d’un programme de subventions de la Fondation de la faune (site internet de la Fondation pour les détails). Cela donnait un caractère beaucoup plus « spécifique » à cette journée que je ne l’imaginais au départ. Toutefois, j’ai pris conscience que le caractère « spécifique » de cette journée n’avait que peu à voir avec ma « perplexité »: ce qui nous était présenté correspondait à la nouvelle réalité du monde forestier québécois d’aujourd’hui.
La Forêt à Coeur : bilan de 2012 et perspectives pour 2013
C’est la tradition du Nouvel An : les bilans de l’année qui vient de s’écouler! Ayant installé Google Analytics sur mon blogue au début de l’an dernier, je vais donc pouvoir respecter cette tradition. Cette toute première chronique de 2012 sera donc consacrée à un retour sur l’année qui s’est écoulée, mais aussi à mes plans pour 2013.
Question méthodologie, pour la période considérée j’ai retenu du 13 janvier 2012 (première chronique en 2012) au 12 janvier 2013. Pour le choix des statistiques, qui sont nombreuses sur Google Analytics, je m’en suis tenu aux plus simples à interpréter. Voici donc les principaux chiffres de 2012.
La Forêt à Coeur a reçu 3 042 visiteurs uniques (4 289 au total) dans la dernière année. Naturellement, si vous accédez au site avec votre ordinateur au travail et avec celui de votre maison, Google ne sait pas (encore…) qu’il s’agit de la même personne. Est-ce que c’est beaucoup? Si on se fie aux chiffres de blogues populaires sur les thèmes de la politique ou de l’informatique (pour ce que je connais), c’est vraiment très peu il faut dire! Si on met cependant en contexte le thème de mon blogue, un sujet qui n’apparaît à peu près pas dans les médias nationaux, et le style (lectures souvent un peu longues…), il est difficile d’être déçu.
La fin d’un monde dans la foresterie québécoise?
C’est bientôt la fin… non pas du monde (!), mais d’un monde : celui de la politique forestière des CAAFs (Contrats d’Aménagement et d’Approvisionnement Forestier) en vigueur depuis le 1er avril 1987. Plus fondamentalement, c’est la fin d’un monde où l’industrie s’occupait de la planification forestière alors que dans moins de quatre mois (1er avril 2013) la Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier entrera officiellement en vigueur. C’est le gouvernement du Québec, par le biais du ministère des Ressources naturelles (MRN), qui sera alors responsable de l’aménagement. On peut imaginer que l’on va entrer dans une toute nouvelle ère, mais jusqu’à quel point? À la lumière d’évènements récents de l’actualité, certains des changements les plus significatifs pourraient bien surprendre.
SAF 2012 — Carnet de voyage nº 5 : l’avènement de la foresterie sociale
Un des moments que j’attendais le plus du congrès était la sortie à la Forêt nationale de Colville. Pourquoi? Car suite à l’invalidation par un tribunal des précédentes Planning rules, c’est à la Forêt de Colville que le Secrétaire à l’Agriculture était venu annoncer que le USDA Forest Service, dont il est le patron politique, allait établir de nouvelles Planning rules basées sur le modèle de cette Forêt nationale plutôt que de continuer la bataille devant les tribunaux (rappel : les Planning rules encadrent la production des plans d’aménagement — chroniques sur le sujet). Quelle est la particularité de ce modèle? Cela fait près de dix ans que des projets d’aménagement forestier ont lieu dans cette Forêt nationale de 4 450 km2 sans qu’il y ait de contestations judiciaires. Un exploit dans le monde de l’aménagement des forêts publiques aux États-Unis! À la base de ce succès, l’avènement d’un nouveau paradigme : la foresterie sociale. Un paradigme que je vous invite à découvrir dans cette chronique un peu plus longue que d’habitude… (Vous êtes avisés!)