La légende de la répartition historique du caribou forestier II
Cinquième texte de la série Les Chroniques du caribou.
Dans la première chronique du même nom, j’en étais venu à la conclusion que l’aire de répartition historique du caribou forestier, représentée par la ligne en vert la plus méridionale sur la carte ci-contre, était fautive. Tellement en fait, qu’elle méritait de se faire accoler l’étiquette de «légende». Cela, malgré le fait qu’elle soit tirée d’un document gouvernemental officiel, soit le Plan de rétablissement du caribou forestier (Rangifer tarandus caribou) au Québec — 2013-2023.
Toutefois, constater que cette aire de répartition est irréaliste est une chose; définir une version plus réaliste en est une autre. Il allait donc de soi qu’une suite logique à ce premier texte devrait s’attarder à définir cette nouvelle aire de répartition historique.
Le résultat de ces efforts est représenté par le nouveau trait en vert sur la carte ci-contre. Et le cœur de la chronique d’aujourd’hui consistera à présenter les démarches qui ont permis d’arriver à cette proposition.
En guise de Mot de la fin, il sera fait état d’une recommandation dans l’éventualité d’un nouveau Plan de rétablissement et du bon usage de l’adjectif «historique» lorsqu’il s’agit du caribou forestier.
Sur ce, bonne lecture!
Point de départ
Le point de départ de toute cette démarche fut un rapport gouvernemental publié en 2001 et intitulé Changements historiques et répartition actuelle du caribou forestier au Québec. Les auteurs en sont Courtois et collab. Le point d’intérêt ici est qu’il s’agit des mêmes auteurs qui ont publié, en 2003, l’article scientifique à la source de la carte de répartition historique du caribou forestier dans le Plan de rétablissement. L’article s’intitule Historical Changes and Current Distribution of Caribou, Rangifer tarandus, in Quebec.
Dans un premier temps, je dois dire que c’est la simple curiosité qui m’a amené à consulter ce qui, pour l’essentiel, se veut la source, et en français, des données de l’article scientifique de 2003. Je ne m’attendais pas à de grandes découvertes. Jusqu’à ce que je visualise la carte ci-dessous tirée dudit rapport.
À l’exception de la délimitation contemporaine datée de 1968 plutôt que 2012 dans le Plan de rétablissement, c’est essentiellement la même carte. Toutefois, mon attention a été attirée par les deux références qui y sont liées.
Une bonne part de ma conclusion voulant que l’aire de répartition de 1850 était une légende était basée sur les références méthodologiques de Courtois et collab. (2003). Or, ces deux références cartographiques étaient nouvelles pour moi.
Après vérification, elles étaient aussi associées à la carte dans Courtois et collab. (2003). Quelles que soient les raisons qui m’avaient amené à les rater la première fois, elles offraient de nouvelles pistes de recherche. Pistes qui m’ont amené plus loin dans le temps que je n’aurais imaginé au départ!
La grande quête cartographique
Je n’ai trouvé ni les références de Paquet (1997) ou de Brassard (1968). Ce fut là un faux départ.
Toutefois, considérant le titre (La distribution des ongulés sauvages de la province de Québec) et l’année associée à Brassard (1968), il était très probable que cette référence soit liée à l’aire de répartition contemporaine du caribou forestier. Paquet (1997) devait donc être liée à la répartition historique.
À ma grande surprise cette dernière s’intitule Toward a mountain caribou management strategy for British Columbia.
Comment une référence en Colombie-Britannique pouvait-elle servir de source à l’aire de répartition historique du caribou forestier au Québec? Observant la carte plus en détail, je réalisais alors que celle de Courtois et collab. (2001) n’était qu’un extrait d’une carte plus générale couvrant la répartition historique du caribou à l’échelle du Canada.
À défaut d’avoir la référence de Paquet (1997) en main, je fis donc une recherche pour retracer des cartes de répartition historique du caribou au Canada.
La première référence trouvée provient elle aussi de Colombie-Britannique. Il s’agit d’un rapport intitulé Boreal caribou in northeastern British Columbia par Goddard (2009). On y retrouve la carte ci-dessous.
Malgré le degré de précision de l’échelle, on peut noter, à la hauteur du Québec, des similitudes avec l’aire de répartition historique retenue dans le Plan de rétablissement. Toutefois, il s’avère que cette carte est basée sur une précédente référence, soit Thomas et Gray (2002).
Cette dernière, intitulée Assessment and Update Status Report on the Woodland Caribou Rangifer tarandus caribou in Canada, est un rapport du COSEPAC (COSEWIC en anglais), soit le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. On y retrouve la carte ci-dessous qui, là encore, à la hauteur du Québec, ressemble à celle que l’on peut retrouver dans le Plan de rétablissement.
… Et il y a deux autres références associées à la carte!
Il va de soi que j’ai laissé de côté la «communication personnelle» pour me concentrer sur Kelsall (1984) qui a écrit, encore pour le COSEPAC, un rapport s’intitulant Status report on the woodland caribou, Rangifer tarandus dawsoni and Rangifer tarandus caribou.
Un point d’intérêt particulier est que Kelsall (1984) était ma première référence antérieure à celle de Paquet (1997). Aussi, et je résume ici mes démarches, j’avais alors pu noter que Kelsall (1984) était cité par d’autres auteurs. C’était donc une référence clé à obtenir.
Petit hic : ce rapport était non publié.
Considérant qu’il datait de 40 ans, je dois avouer avoir ici craint que ma recherche ne débouche sur un cul-de-sac. Mais non! Le surlendemain d’une requête au COSEPAC pour en obtenir copie, je recevais la version électronique du rapport … «Merci!» et chapeau pour l’efficacité!
Dans ce rapport, on retrouve la carte ci-dessous :
Encore là, on peut y voir un patron familier avec les autres cartes présentées et celle dans le Plan de rétablissement. Et il y a aussi deux autres références associées à la carte!
À noter que Kelsall (1984) souligne ceci dans son texte :
Statements of continent-wide distribution for caribou in Canada are given by Seton (1927), Anderson (1938), and Banfield (1961). The first provides, perhaps, the best picture of historic range.
— Kelsall (1984), p. 7
Seton (1927) devenait donc la référence à retracer! Et j’ai pu mettre la main dessus. À tout le moins sa réédition de 1953. À noter que M. Seton est décédé en 1946.
Cette référence est en fait une série de livres, sous forme encyclopédique, intitulée Lives of game animals. Dans le Volume III — Partie I on y retrouve la carte suivante :
Et là, non seulement des différences apparaissent, mais il n’y a pas d’autres références cartographiques! Par rapport aux autres cartes trouvées depuis le début de cette quête ainsi que celle du Plan de rétablissement, notons que sur la carte de Seton (1927/1953) :
- Il n’y a pas une seule grande population de caribous, mais deux bien distinctes; soit une sur la Rive-Nord du fleuve Saint-Laurent et une autre sur la Rive-Sud.
- La vallée du Saint-Laurent et le sud du Québec (approximativement l’Outaouais) sont exclus.
- À l’exception du Maine, l’aire de répartition ne va pas beaucoup plus au sud que le Québec.
Il est bon ici de présenter les précisions de Seton (1953) touchant nos contrées.
Pour le Québec et l’Ontario :
Throughout the Canadian faunal region of Quebec and Ontario, the Caribou is and always has been of general distribution. In 1897, G. S. Miller, Jr., wrote: “Caribou are very abundant on the north shore of Lake Superior, where they replace the Deer and Moose of the Canadian Zone.”
—Seton (1953), p. 61
Plus spécifiquement, pour la Gaspésie :
«Fairly common on the higher peaks of the Shickshock Range.» [tiré de Goodwin 1924]
—Seton (1953), p. 59
Pour le Vermont et le New Hampshire :
«It is only a few years since this animal occasionally appeared in the northern parts of Vermont and New Hampshire.» [tiré de Emmons 1840]
Reference to early authorities such as Josselyn (1672) shows that in New England this species was, at best, a rare straggler, except in Maine.
—Seton (1953), p. 59, 61
Pour le Maine :
«[…] The first herd of Caribou to be seen in Maine for over 25 years was reported here to-day by John J. Newbegin and S. Philips Wilson, Philadelphia sportsmen, who saw 12 of the animals, 7 cows and 4 bulls, on Mt. Katadhin last Tuesday morning. The animals trotted off into the woods without appearing greatly alarmed.» [Tiré de Forest & Stream 1914]
«Herbert Spencer, a warden located in the vicinity of the St. John waters … corroborated the reports that have been coming in for the last two years. Mr. Spencer states that this winter he has observed a herd of about 30 of the animals which is staying around a certain section of the Maine side of the St. Lawrence River.» [tiré de Austin 1915]
— Seton (1953), p. 59
En supplément, considérant l’ancienneté de Josselyn (1672), j’ai été curieux d’en savoir plus et j’ai pu retracer la référence. Dans ce cas, c’est une analyse en note de bas de page qui fournit des détails intéressants. Il y est mentionné qu’il est probable que l’auteur a confondu avec le wapiti (American elk). Pour autant, dans cette note il est aussi précisé que le caribou est «a well-known inhabitant of the north-eastern parts of New England» (Josselyn 1672, note 56), ce qui cadrerait bien avec le Maine.
Le grand questionnement ici était à savoir si, depuis Seton (1953), de nouvelles connaissances auraient justifié un abaissement vers le sud de l’aire de répartition du caribou forestier.
Le caribou en Nouvelle-Angleterre
Pour entamer cette démarche, le plus logique est de se tourner à nouveau vers Kelsall (1984), une référence clé des 40 dernières années.
Dans une précédente citation où cet auteur mentionne ses sources pour l’aire de répartition historique du caribou forestier, en plus de Seton (1927) on retrouve aussi Anderson (1938) et Banfield (1961).
Je n’ai pas trouvé Anderson (1938), qui s’intitule The present status and distribution of the big game mammals of Canada. Toutefois, j’ai pu mettre la main sur Banfield (1961) dont le titre est A revision of the reindeer and caribou, genus Rangifer.
C’est là un rapport publié pour le compte du gouvernement du Canada qui se veut une analyse taxonomique du genre Rangifer à l’échelle planétaire. C’est un petit livre de 137 pages, mais très dense! On y retrouve aussi plusieurs considérations historiques, dont la carte ci-dessous liée au caribou forestier. Elle est précédée de l’avis suivant :
The distribution outlined below is that at about the close of the nineteenth century, before the caribou population was curtailed by the expanding European population in North America. It will be observed to approximate the distribution of Boreal Forest in North America.
—Banfield 1961, p. 73
Considérant que l’échelle ne rend pas le repérage très précis à la hauteur du Québec, on peut cependant référer au texte qui l’accompagne.
The southern boundary of caribou distribution passed through central Maine from a coastal point near the head of Penobscot Bay westward to central Oxford County […]. In northern Maine, caribou were once fairly abundant, particularly around Mount Katahdin, which was their last stronghold in the State (Palmer 1938). They also occurred in extreme northern New Hampshire where caribou were reported at the Connecticut Lakes by Norton (1885) and Jackson (1922). They were reported also from extreme northeastern Vermont in the early part of the nineteenth century by Emmons (1840). Caribou were not known to have occurred in New York state in recent years (DeKay 1842, and Merriam 1884).
In the Province of Quebec, south of the St-Lawrence River, woodland caribou were originally distributed in the Appalachain Mountain region east of a line joining Lake Memphremagog and Three Rivers (Baird 1859). North of the St. Lawrence the whole of the vast Quebec-Labrador peninsula was occupied by woodland caribou or woodland-tundra intergrades in western Ungava along the Hudson Bay coast. Although exact data are wanting, caribou were probably absent from the upper St. Lawrence River valley and the lower Ottawa Valley as far north as Mattawa, Ontario.
— Banfield 1961, p. 73
Cela nous rapproche beaucoup plus de Seton (1953) que de Kelsall (1984). Et c’est très loin de ce que l’on retrouve dans le Plan de rétablissement 2013-2023.
Le caribou dans l’État de New York
Dans le détail, une grande interrogation concerne l’extension de cette aire de répartition historique dans l’État de New York. Revenons ici à Kelsall (1984) :
In the southeast, caribou range extended into the United States, through Maine and into northern New Hampshire, northeastern Vermont, and perhaps the northwest corner of New York State (Seton 1927, Goodwin 1932, Banfield 1961, Guilday 1968).
— Kelsall 1984, p. 9
Seton (1927/1953) et Banfield (1961) ont mentionné le nord du Vermont et du New Hampshire, mais pas l’État de New York. En fait, selon Banfield (1961) le caribou forestier est absent de cet État depuis fort longtemps, citant alors des références de 1842 et 1884. Restent donc Goodwin (1932) et Guilday (1968) comme sources possibles.
Goodwing (1932) est un article dans le Journal of Mammalogy intitulé New records and some observations on Connecticut mammals. Voici le seul passage concernant le caribou :
Sherman W. Adams included caribou in his list of “Native and Wild Animals of Connecticut (1840).” There is no conclusive evidence available that caribou were ever found there. Caribou range only as far south as Grafton, Maine, and have been recorded from Connecticut Lakes, New Hampshire. It was probably the suitable food and conditions for caribou on the elevated ridges in Connecticut which led Adams to believe that they originally ranged in this State.
— Goodwing 1932, p. 40
Cela va dans le sens de Seton (1927/1953) et Banfield (1961).
Guilday (1968) est une Note de recherche intitulée Archeological evidence of caribou from New York and Massachusetts. Elle aussi a été publiée dans le Journal of Mammalogy.
Il y est noté que les restes de caribous et autres mammifères ont été extraits d’une grotte dans le comté d’Orange qui est situé à une centaine de kilomètres au nord-ouest de la ville de New York. Ont pu être identifiées : 25 espèces de mammifères, neuf d’oiseaux, quatre de reptiles, deux d’amphibiens et trois de poissons. Si la datation au C14 n’a pas été possible pour le caribou, des restes de pointes de projectiles, associées à sa même strate d’excavation, ont quant à elles été datés à 11 000 ans avant aujourd’hui. Il est aussi précisé que :
All of them [les différentes espèces], with the exception of the caribou, are, or were until European colonization, characteristic of the region as it is today.
—Guilday 1968, p. 344
Pour le rappel, il y a 11 000 ans un inlandsis recouvrait l’actuel territoire québécois. La région de New York représentait alors une zone de répartition très nordique pour le caribou!
Conséquemment, à moins de fusionner des données séparées de plusieurs milliers d’années, l’État de New York ne peut être considéré comme faisant partie de l’aire de répartition historique, version 19e siècle, du caribou forestier.
Deux écotypes distincts
Pour boucler la boucle, revenons à Courtois et collab. (2001) qui nous permettent de mieux comprendre la répartition du caribou forestier dans le courant du 19e siècle.
Dans l’annexe 1 de ce rapport, on retrouve le passage qui suit. À préciser qu’il est alors question du caribou montagnard et de la harde de la Gaspésie.
Cette harde montagnarde [de Gaspésie] constitue la seule relique des populations présentes au sud du Saint-Laurent. Le caribou est disparu du nord des États-Unis et des provinces atlantiques au tournant du 19e siècle (Vermont : 1830-1839; New Hampshire : 1860-1869; Île-du-Prince-Édouard : 1874; Maine : 1906-1914; Nouvelle-Écosse : 1905-1912; Nouveau-Brunswick : 1927) […]
— Courtois et collab. (2001), p. 37
Pour ici faire un petit rappel taxonomique, il n’existe qu’une seule espèce de caribou à l’échelle planétaire, soit Rangifer tarandus. Le « caribou » au Québec et le « renne » en Europe ne représentent qu’une seule et même espèce.
Il y a cependant des sous-espèces. Au Québec, on en retrouve une seule : le caribou des bois. Cette sous-espèce est segmentée en trois « écotypes » qui possèdent des distinctions génétiques, soit : forestier, montagnard (en Gaspésie) et migrateur (le plus au nord).
Pour l’aspect visuel, la carte ci-dessous présente le relief des secteurs où la présence du caribou fut documentée sur la Rive-Sud du Saint-Laurent au cours du 19e siècle.
Avec toutes ces informations, on peut arriver au constat suivant :
Il est probable que lorsque l’inlandsis a commencé à fondre et que les caribous ont suivi vers le nord, il y a eu pendant un temps une seule grande population. Cette dernière se serait cependant fragmentée avec le temps et il apparaît assez évident que, au 19e siècle, les caribous «écotype forestier» au nord du fleuve Saint-Laurent et les caribous «écotype montagnard» au sud n’avaient pas d’échanges entre eux.
Et, de ce grand constat, on peut mieux comprendre la proposition de nouvelle délimitation historique du caribou forestier en introduction.
Questions sans réponses
Malgré ce travail de recherche, il reste trois grandes interrogations.
1) Débutant avec Kelsall (1984), dans la documentation scientifique il y a eu fusion des deux populations bien distinctes de caribous de Seton (1927/53) ce qui a amené à «couvrir» le Québec de caribous forestiers. Pourtant, aucune référence ne semble le justifier. Et même si je n’ai pas pu toutes les retracer, j’ai consulté assez de sources pour rester dubitatif face à cette évolution de l’histoire.
2) L’autre phénomène inexplicable est la tendance d’illustrer l’aire de répartition du caribou forestier au 19e siècle de plus en plus vers le sud. Encore là, non seulement rien ne le justifie, mais c’est aussi en contradiction à d’autres éléments historiques.
Comme je le montrais dans ma précédente chronique sur ce thème, au milieu du 19e siècle les États-Unis étaient en plein processus de colonisation. Ce qui se traduisait, en particulier en Nouvelle-Angleterre, par la conversion des forêts en champs agricoles. Les conditions n’étaient donc absolument pas propices au caribou forestier.
3) Il faut finalement se questionner sur le processus d’analyse de la documentation historique dans Courtois et collab. (2001 et 2003). Ils avaient toutes les informations en main pour corriger les bizarreries de l’aire de répartition du caribou forestier au 19e siècle qui se sont propagées de rapport en rapport.
Pour un, il y a déjà le point majeur lié au fait que, dans Courtois et collab. (2001), ils associaient les populations de caribous aux États-Unis au caribou écotype « montagnard » plutôt que « forestier ». Ce sont deux enjeux distincts même s’ils partagent une même réalité. Ils ne devraient pas être fusionnés.
Pour deux, et j’en ai déjà parlé, Courtois et collab. (2003) en viennent à la conclusion que, en 1850, le caribou forestier avait disparu de la vallée du Saint-Laurent («The Caribou had disappeared from the St. Lawrence valley by 1850», p. 401). Cela ne paraît pourtant pas dans leur cartographie de répartition historique placée exactement à l’année 1850. C’est très bizarre et toujours inexplicable pour moi.
Recommandations
En guise de mon traditionnel Mot de la fin, il semble plus approprié de compléter ce texte avec deux recommandations :
Tout d’abord, pour le contexte, le Plan de rétablissement du caribou forestier 2013-2023 représentait la deuxième mouture de nos efforts envers cette espèce (écotype). Dans l’éventualité d’un troisième, il conviendrait de réévaluer tous les aspects associés à son histoire. L’idée que l’aire de répartition historique soit en grande régression depuis le 19e siècle est de fait une justification centrale du Plan de rétablissement.
Finalement, lorsque l’on utilise le terme « historique » pour le caribou, il faut mettre en contexte que cette espèce a été une contemporaine des mammouths, aujourd’hui disparus. Et, dans les faits, étant un animal du froid, son aire de répartition régresse vers le nord depuis environ 12 000 ans et la fin du dernier Âge glaciaire. Donc, associer le 19e siècle au point de départ de l’histoire du caribou forestier, c’est un peu court. Dans le contexte d’un éventuel troisième Plan de rétablissement, il serait essentiel qu’il y ait une réflexion à ce sujet.
Principales références
- Banfield A.W.F. 1961. A revision of the reindeer and caribou, genus Rangifer. Ottawa: Canada, Dept. of Northern Affairs and National Resources. 137 pages.
- Courtois, R. Ouellet, J. P., Gingras, A., Dussault C., Breton L. et J. Maltais. 2003. Historical Changes and Current Distribution of Caribou, Rangifer tarandus, in Quebec. The Canadian Field-Naturalist 117 (3): 399–414.
- Courtois, R. Ouellet, J. P., Gingras, A., Dussault C., Breton L. et J. Maltais. 2001. Changements historiques et répartition actuelle du caribou forestier au Québec. Rapport. Ministère des Ressources naturelles du Québec. 44 p.
- Goddard, A. D. 2009. Boreal caribou in northeastern British Columbia: Biological rationale, data summary & literature review. Peace region technical report. 21 pages.
- Goodwin, G. G. 1932. New Records and Some Observations on Connecticut Mammals. Journal of Mammalogy 13 (1): 36–40.
- Guilday, J. E. 1968. Archaeological evidence of caribou from New York and Massachusetts. Journal of Mammalogy 49 (2): 344–345.
- Josselyn, J. 1672. New-Englands rarities discovered: in Birds, Beasts, Fishes, Serpents, and Plants of that Country.
- Kelsall, J.P. 1984. Status report on the woodland caribou Rangifer tarandus dawsoni and Rangifer tarandus caribou in Canada. Committee on the Status of Endangered Wildlife in Canada. Ottawa. 103 pages.
- Seton, E.T. 1953. Lives of game animals—Volume III, part I : Hoofed animals. Éditeur : Charles T. Brandford, Company. Réédition de 1927; première édition en 1909. 412 pages
- Thomas, D.C., et D. R. Gray. 2002. Update COSEWIC status report on the woodland caribou Rangifer tarandus caribou in Canada. Committee on the Status of Endangered Wildlife in Canada. Ottawa. 98 pages.
Encore merci pour ces précisions et la rigueur de la recherche. Ces informations nous permettent d’avoir un éclairage nouveau sur la présence historique des caribous forestiers. De cela doit découler une stratégie de rétablissement connectée à la réalité historique, et votre travail j’espère sera utile à ceux qui auront la responsabilité d’écrire le nouveau plan. Je dois par contre émettre malheureusement certains doutes que cela sera tenu en compte. En effet, la revue de presse de l’ERCF ne veut pas tenir compte des informations contenues dans ce blogue, j’ai vérifié, parce qu’on m’a dit que c’était un blogue et qu’on ne pouvait pas s’attarder à tous les blogues… (!) Pourtant, ai-je mentionné, le vôtre est plus proche d’un article scientifique que bien des articles écrits par des scientifiques à qui on accole ce qualificatif… Continuez cet excellent travail! Ça fait son chemin tranquillement… Salutations!
😉😊
Encore merci pour les bons mots !
Oui, je suis conscient qu’il est facile d’ignorer ce que j’écris sous l’argument « C’est juste un blogueur ». Ça ne m’offense pas. En fait, c’est plutôt un stimulant pour m’investir à élever mon niveau. Après, si ce que j’écris est solide et pertinent, j’ai confiance que ça fera son chemin, quel que soit le dédain que l’on puisse porter à mon statut de blogueur 😌… Et quel que soit le temps que ça pourrait prendre (je peux être très patient).
Bonjour Mr Alvarez, je cherche à en savoir plus sur les concessions forestières au Québec, notamment les méthodes et la façon d’en établir les limites à l’époque, avant 1974 (1900-1974). Je travaille actuellement sur un projet pour lequel je mets à jour certaines limites de concessions forestières de 1974 et moins, je me demandais si à l’époque on établissait ces limites selon les bassins hydrographiques et limites de cadastres originaire. Pourriez-vous me dire comment en savoir plus et où obtenir des informations sur ce sujet, merci.
Bonjour! Je vous ai répondu directement à votre courriel. Bien cordialement et bonne journée! EA