La forêt au cœur des jeux
Les jeux de société font partie de mes passe-temps favoris. En plus d’y jouer, j’aime aussi suivre l’actualité de ce petit monde. Il y a quelques mois déjà, mon attention avait été attirée par un jeu dont l’objectif est de combattre les feux de forêt (Sylvion). Avant que vous ne le « googliez », je précise que c’est abordé de façon très fantaisiste, le visuel ci-contre en donnant un aperçu. Je vous le présente d’ailleurs plus loin.
Toutefois, en plus de me donner l’idée de vous le présenter, la découverte de ce jeu m’a fait réaliser que les jeux à thème forestier étaient extrêmement rares. Donc, tant qu’à écrire une chronique ludique, je me suis dit que ce serait l’occasion de pousser la recherche sur la place de la forêt dans les jeux de société. Il me semble évident que ces derniers ont une dimension très culturelle. « Quelque part », la place qu’occupe la forêt dans les jeux ne peut qu’être un reflet de la place qu’elle occupe dans notre culture, notre imaginaire collectif.
Pour finir l’année 2016, je vous présente donc une chronique mariant mes intérêts professionnels et ludiques, une chronique abordée dans l’esprit « léger » du temps des Fêtes.
La recherche
La première étape de mon exploration sur la place de la forêt dans les jeux de société fut (logiquement) de les recenser. Pour cela, je me suis tourné vers trois sites de référence, soit BoardGameGeek, Tric Trac et Vidéorègles. Ces trois sites ont pour point commun d’exister depuis très longtemps et ont donc une banque de jeux très vaste. Le troisième site a pour particularité, comme son nom l’indique, de ne présenter que des règles en vidéo. Sa « banque » est moins large que les deux premiers, qui ont pour mission de couvrir un maximum de jeux, mais il a l’avantage d’être plus sélectif.
Ce recensement prit une forme assez simple alors que j’ai recherché des jeux pour lesquels les mots « forêt » et « bois » (et leurs équivalents en anglais) étaient dans le titre ou associés à un mot-clé.
Quantitativement, c’est le mot « wood(s) » qui a donné le plus de résultats. En fait, heureusement qu’il y avait cette recherche, car très peu de jeux sont ressortis avec les autres mots ! À noter dans les limites de cette petite étude que le jeu Sylvion n’est logiquement pas ressorti, car le titre n’est pas directement lié aux mots recherchés. Toutefois, et malgré la simplicité de ma recherche, mon suivi de l’actualité ludique des dernières années me donne confiance qu’il y a peu de jeux qui ont ainsi été « échappés ». Je ne m’attarderai pas sur le détail des statistiques, car qualitativement le constat se résume ainsi : lorsque la forêt est en tête d’affiche d’un jeu, c’est presque exclusivement en tant qu’élément du décor ! D’où ma deuxième démarche.

Une partie du jeu 7 Wonders (Photo: Marcin Wichary, Source: Wikimedia Commons)
La deuxième étape de mon exploration a consisté à recenser les jeux où la forêt joue réellement un rôle. Pour cela, je me suis tourné vers les jeux de « civilisation », soit des jeux où l’on doit faire évoluer une société dans le temps. Ici, je me suis « limité » au site Vidéorègles qui a indexé ses plus de 500 jeux avec des mots-clés, dont « civilisation ».
À ma grande surprise, sur les neuf jeux que j’ai recensés sur ce thème, la forêt était présente seulement dans deux (7 Wonders, L’Âge de pierre). Dans ces deux cas, ce fut exclusivement pour sa ressource « bois » et elle représentait la ressource la moins rare.
La réflexion
Lorsque l’on s’attarde à la façon dont la forêt est intégrée aux jeux, j’ai perçu deux extrêmes. D’un côté, lorsqu’elle sert de décor, la forêt représente l’inconnu, que ce soit dans une perspective positive (La forêt enchantée) ou négative (La forêt hantée). D’un autre côté, quand elle est utilisée, c’est « sèchement » pour produire du bois et généralement pour les seules constructions. Jamais la forêt n’est représentée comme un milieu de vie comme elle l’est d’aussi loin que l’on peut remonter dans le temps.
Pour ceux qui ici pourraient se poser la question, cette sous-utilisation de la forêt dans les jeux de société n’est certainement pas due à la complexité potentielle du sujet. Les concepteurs des jeux d’aujourd’hui peuvent être considérés comme des modélisateurs de génie alors qu’ils sont capables d’aborder des sujets très complexes avec des mécanismes (relativement) simples. La réponse, j’en suis convaincu, est avant tout culturelle.
La dernière chose que je voulais faire dans cette chronique était de référer à mon précédent texte qui ne cadre pas dans ma définition de chronique « légère » 🙂 Je me limiterai à dire que si au Québec nous étions culturellement plus proches de la forêt comme milieu de vie, L’Erreur boréale aurait assurément eu beaucoup moins de succès. Mais, et c’est particulièrement le cas de notre monde occidental, nous sommes avant tout des sociétés urbaines et agricoles. La forêt, c’est surtout celle que nous avons coupée pour nous installer, coloniser le territoire. Relativement peu de gens vivent de la forêt aujourd’hui. En ce sens, il est normal que les jeux de société reflètent cette réalité.
Malgré tout, il y a quelques jeux « forestiers » et je vous en présente trois ci-dessous :
Les jeux
Forestia
Je ne m’attarderai pas sur celui-ci, car j’ai déjà fait une chronique à son sujet. De plus, je le décrirais plutôt comme un (très bon) outil pédagogique… par le jeu. Avoir eu l’occasion d’y jouer au secondaire, je me serais décidé beaucoup plus rapidement d’aller en foresterie !
Sylvion

Une de mes parties de Sylvion. Ma situation était alors perdue, car le feu allait atteindre la forêt et je n’avais pas assez de cartes vertes (6) à retourner (en haut) par rapport à la force des feux (7 ; 4+3) qui allaient toucher la forêt.
Le jeu qui a engendré cette chronique. À noter tout d’abord que l’éditeur est québécois. Donc, s’il vous intéresse, comme c’est un jeu récent (2015), vous ne devriez pas avoir trop de difficultés à le trouver.
L’objectif du jeu est simple : empêcher la forêt de brûler. La mécanique est basée sur le principe des Tower Defense. Le terme étant souvent repris comme tel en français, je vais m’en tenir à celui-ci. Ceux qui ont déjà joué à Plantes contre Zombies comprendront aisément le principe : le combat se fait de façon indirecte par le biais des « remparts » que nous plaçons. Dans le cas de Sylvion, le feu attaque et l’on place des cartes sur le jeu pour défendre la forêt. Ce sont ces dernières qui combattent le feu.
L’aspect fantaisiste maintenant : il s’agit de la forêt de « l’Onivers » (onirique – rêves). Comme « soldats » on retrouve d’ailleurs des baleines, des éléphants et des hérissons 🙂 Les images ci-dessous illustrent deux de mes parties.

Une partie de Sylvion qui pour un temps s’est mieux déroulée, mes défenseurs contrôlant les feux. La situation s’est toutefois dégradée et j’ai quand même perdu.
Un détail particulier de ce « jeu de société » est qu’il se joue très bien tout seul. En fait, même si l’on peut jouer à deux (je n’ai pas essayé), il semblerait que la version solo soit la plus intéressante.
Ne vous laissez pas berner par son visuel « enfantin » : il n’est pas facile ! Je ne sais pas si j’ai raté quelque chose dans les règles, mais il m’a battu à chaque fois !
Ce n’est pas un jeu très cher (une vingtaine de $). Ayant toutefois déjà plus de jeux que nous n’avons le temps d’y jouer, je me suis contenté d’aller le tester dans un pub ludique (La Revanche). Cela dit, c’est vraiment un bon petit jeu à la mécanique simple et avec des parties rapides.
Logger
Ce n’est pas un outil pédagogique comme Forestia, mais bien un jeu de société paru en 2008, ce qui peut le rendre difficile à trouver. Ma petite recherche sur eBay est demeurée vaine.
C’est un jeu que j’ai découvert sur le site BoardGameArena, un site dédié à transposer en ligne des jeux sur plateau. Ce ne sont pas seulement de « vieux » jeux, il y en a aussi de très récents. Vous pouvez jouer gratuitement. Une contribution financière permet « d’ouvrir » une table de jeu, soit proposer une partie à d’autres joueurs en ligne. Mais vous pouvez vous « présenter » à une table sans être contributeur. Pour la petite note, vous pouvez jouer avec une interface en français.
Le but dans Logger est de couper dix arbres matures. Il y a déjà un arbre au stade « plant » en commençant une partie, mais il va falloir en planter d’autres. Les arbres croissent ensuite en trois phases : plant -> jeune -> mature. À chaque tour de jeu, tous les arbres croissent d’un stade et les arbres matures produisent des plants sur les cases adjacentes.
À y jouer, on oublie son visuel austère (un plateau de 5 x 5), car c’est stratégique… et politiquement incorrect 🙂 Pour empêcher une adversaire de couper un arbre mature, vous pouvez y « accrocher » un manifestant (photo ci-dessous) ! Les autres éléments de règles étant très simples, je vous laisse les découvrir.
Sur ce, bon temps des Fêtes et amusez-vous bien ! 🙂
La ressource bois est très présente dans de nombreux jeux dont certainement l’un des plus célèbres, Minecraft!
… auquel je n’ai jamais joué! Je suis beaucoup plus intéressé par les jeux « sur plateau » que les jeux « vidéo » 😉 Cela dit, je serais curieux de voir les résultats d’une même petite recherche dans ce monde.
Merci pour la contribution 🙂
Sur le thème des jeux ayant pour thème les feux de forêt, dans la catégorie « jeux vidéos », il y a celui-ci :
https://www.facebook.com/SIMULATEURINCENDIEFORET/
Merci!