Joyaux d’histoire forestière
Pour poursuivre avec le thème de l’histoire forestière de la précédente chronique, je vous présente aujourd’hui deux précieuses références sur l’histoire forestière des États-Unis (et en partie du Canada) datant de la fin du 19e siècle. Ces références sont tirées de deux petits articles du blogue à thématique historique The Vault affilié à la revue internet Slate.
Le premier article nous fait découvrir 16 cartes numérisées datées de 1884 représentant, pour la grande majorité, la distribution spatiale de plusieurs « genres » d’essences forestières en Amérique du Nord (exemple Figure ci-contre). Ces cartes ont été produites sous la supervision de M. Charles Sprague Sargent, un dendrologue et horticulteur alors mandaté à cette tâche par le Bureau du recensement des États-Unis (United States Census). Pour l’éphéméride, M. Sargent fut le premier directeur de l’Arnold arboretum de l’Université de Harvard, le plus ancien arboretum public en Amérique du Nord.
Si l’article du blogue ne présente que quelques-unes des cartes, vous pouvez toutes les retrouver sur le site David Rumsey map collection. C’est là de fait une référence à sauvegarder comme « signet » si vous vous intéressez à l’histoire tout court, car la mission du site est de numériser des cartes rares des Amériques datant des 18e et 19e siècles. Le site annonce qu’ils ont numérisé plus de 150 000 cartes!
Le deuxième article traite d’un sujet plus pointu qui intéressera surtout les forestiers. Il s’agit de plaques avec de minces coupes transversales du bois de 350 essences forestières que l’on pouvait rencontrer en Amérique du Nord vers la fin du 19e siècle (exemple Figure ci-dessous). C’est là l’œuvre du botaniste M. Romeyn Beck Hough qui a accompli ce travail entre 1888 et 1913 à l’aide d’une « machine à trancher » (slicer) qu’il avait lui-même développée. Plus largement, il s’agit d’une œuvre encyclopédique alors que les noms d’arbres étaient présentés en cinq langues et que les essences étaient décrites en terme d’habitat, propriétés physiques, utilisations…
Il a publié son travail entre 1888 et 1913 sous la forme de 13 volumes intitulés The American Woods: exhibited by actual specimens and with copious explanatory text. Suite au décès de M. Hough, c’est sa fille, à l’aide des notes que son père avait laissées, qui s’est occupée de faire publier un 14e volume en 1928.
À l’époque, vous pouviez obtenir un volume de la collection de M. Hough pour 5$, ce qui était alors un prix élevé! En 2000, la firme de vente aux enchères Christie’s a vendu un ensemble complet de ces volumes pour 92 100$. Point intéressant, il semble que ce soit une bibliothèque publique du Massachusetts qui s’en est portée acquéreur.
Le fait que certaines essences forestières soient devenues très rares depuis le 19e siècle (exemple: cyprès de Gowen) apporte une grande valeur « ajoutée » à l’œuvre déjà immense de M. Hough, devenue aujourd’hui œuvre de mémoire extraordinaire. À défaut de pouvoir physiquement les consulter, les plaques ayant été numérisées, vous pouvez les visualiser ici.